Page:Godwin - Caleb Williams, I (trad. Pichot).djvu/165

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où il entra, elle était dans un accès de délire ; elle crut encore voir approcher des assassins. Elle leur demandait ce qu’ils avaient fait de son Falkland, de son unique bien, de sa vie, de son époux. Elle les suppliait de lui restituer les restes de son corps mutilé, pour qu’elle pût les presser encore dans ses bras mourants, rendre le dernier soupir sur ses lèvres, et être ensevelie dans le même tombeau que lui. Elle leur reprochait leur lâcheté, de servir ainsi d’instrument à la barbarie de son misérable cousin, qui lui avait fait perdre la raison, et qui ne serait pas satisfait qu’il ne l’eût assassinée. M. Falkland s’arracha bientôt de ce lieu de douleur, et, laissant le docteur Wilson auprès de sa malade, il lui recommanda de venir le trouver à son auberge aussitôt après avoir ordonné ce qu’il y avait à faire.

L’agitation continuelle dans laquelle avait été miss Melville pendant plusieurs jours, par la nature de sa maladie, avait épuisé totalement ses forces. Environ une heure après la visite de M. Falkland, eut lieu une crise qui la laissa si bas, qu’il était difficile d’apercevoir en elle quelques signes de vie. Le docteur, qui venait de sortir pour calmer un peu le trouble et l’impatience de M. Falkland, fut appelé de nouveau d’après ce changement de symptômes, et il passa le reste de la nuit près du lit de la malade. La situation de celle-ci était telle, qu’on pouvait craindre de la voir expirer d’un moment à l’autre. Tandis que miss Melville était dans cet état de faiblesse et d’épuisement, on voyait sur la figure de Mrs. Hammond les signes de la plus