Page:Godwin - Caleb Williams, I (trad. Pichot).djvu/181

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de la salle, et d’un coup de son robuste bras il l’étendit à terre. Celui-ci ne fut pas cependant étourdi du coup, et se releva aussitôt. Il est aisé de sentir combien il était inférieur dans une lutte de cette espèce. À peine fut-il relevé que M. Tyrrel lui porta un autre coup. M. Falkland était sur ses gardes, et ne tomba point ; mais les assauts de son adversaire redoublèrent avec une rapidité inconcevable. M. Falkland fut encore terrassé une seconde fois. M. Tyrrel le foula aux pieds et se baissa comme pour le saisir et le traîner sur le plancher ; cette lutte fut l’affaire d’un moment, et se passa avant que les témoins de la scène fussent revenus de leur surprise. Enfin, on se mit entre deux, et M. Tyrrel sortit une seconde fois.

Il serait difficile d’imaginer quelque événement plus terrible que le traitement auquel venait d’être exposé M. Falkland. Toutes les passions de sa vie semblaient faites pour le lui rendre plus insupportable. Il avait mis en usage à différentes fois toutes les ressources de sa prudence et de son énergie pour prévenir que la mésintelligence entre lui et M. Tyrrel entraînât de fâcheuses extrémités ; mais en vain : elle s’était terminée par une catastrophe mille fois plus horrible que tout ce qu’il aurait pu craindre, que tout ce qu’eût pu jamais imaginer la prévoyance même. Pour M. Falkland, le déshonneur était pire que la mort. La plus légère apparence d’insulte l’atteignait jusqu’au fond de l’âme. Que devait-ce donc être de cette scène affreuse où l’ignominie et les humiliations avaient été publiques ? Si M. Tyrrel