Page:Godwin - Caleb Williams, I (trad. Pichot).djvu/200

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l’examinant sur toutes les faces imaginables. Dans la première communication qui m’en avait été donnée, elle m’avait paru suffisamment claire et satisfaisante ; mais, à mesure que je la méditais, j’y découvrais successivement de l’obscurité et du mystère. Le caractère d’Hawkins avait quelque chose de bien étrange. Si ferme, si inébranlable dans ses principes de justice et d’honnêteté, comme il s’était montré d’abord, et tout d’un coup devenir assassin !...... Comme sa première conduite, pendant sa persécution, était faite pour prévenir en sa faveur !… Certes, s’il était coupable, c’était une grande cruauté de sa part de laisser subir un jugement pour son crime à un homme aussi respectable que M. Falkland. Toutefois, il m’était impossible de ne pas plaindre amèrement le sort de cet honnête paysan, traîné ainsi à l’échafaud par l’effet des machinations diaboliques de cet infernal Tyrrel. Et son fils ! ce fils pour l’amour duquel il avait sacrifié tout ce qu’il avait au monde, expirer avec lui au même gibet ! Certainement, on ne pouvait rien imaginer de plus capable d’émouvoir.

Après tout, était-il donc possible que M. Falkland lui-même fût l’assassin ! Le lecteur aura peine à croire qu’il me passa par la tête l’idée de lui en faire la question à lui-même. Ce ne fut qu’une idée fugitive, mais elle peut servir comme une preuve de la simplicité de mon caractère. Ensuite revenaient à ma pensée toutes les vertus de mon maître, vertus presque trop élevées, trop sublimes pour la nature humaine ; enfin, ses souffrances si inouïes,