Page:Godwin - Caleb Williams, I (trad. Pichot).djvu/215

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maines dans la prison du comté. Cela est de toute vérité, monsieur. C’est le squire Tyrrel qui l’a fait mettre là. À présent, monsieur, je ne pose pas de fois ma tête sur l’oreiller, dans ma pauvre chaumière, que le cœur ne me saigne de la situation de mon Léonard. Ce n’est pas tant pour la souffrance, ce n’est pas là ce qui m’inquiète ; je ne m’attendais pas qu’il n’eût pas de peine à endurer dans sa vie, je ne suis pas assez sot pour le croire. Mais qui sait ce qui peut lui arriver dans une prison ? Je suis allé trois fois pour le voir, et il y a dans le même coin de prison que lui un homme qui a une si mauvaise figure ! Je ne sais pas comment sont les autres. Certainement Léonard est un des braves garçons qu’il y ait. J’espère bien qu’il n’écoutera pas de pareilles gens. Mais qu’il en arrive ce que Dieu voudra, je suis bien résolu à ne le pas laisser dans cette compagnie-là encore douze heures de plus. Je ne suis peut-être qu’un obstiné et un vieux fou ; mais je l’ai mis dans ma tête, et cela sera. Ne me demandez pas ce que c’est ; s’il me fallait vous écrire et attendre la réponse, cela prendrait huit ou dix jours de plus ; il n’y faut pas penser.

» Le squire Tyrrel est fort opiniâtre, et vous, n’en déplaise à Votre Honneur, vous êtes tant soit peu vif. Je ne veux pas que personne ait du bruit par rapport à moi. Il n’y a déjà eu que trop de mal de fait ; et je ne veux autre chose que me tirer de la presse. Ainsi j’écris ceci à Votre Honneur seulement pour me décharger le cœur. Je