Page:Godwin - Caleb Williams, I (trad. Pichot).djvu/216

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me sens obligé à vous respecter et à vous aimer comme si vous aviez fait pour moi tout ce que vous n’auriez pas manqué de faire, j’en suis sûr, si la chance eût tourné différemment. Il y a beaucoup à parier que vous n’entendrez plus parler de moi davantage. Si cela est, tenez votre digne cœur en repos. Je me connais trop bien pour être jamais tenté de rien faire qui soit réellement mal. Il faut maintenant que j’aille chercher ma fortune dans le monde. J’ai été assez maltraité, Dieu le sait ; mais je n’en garde pas de rancune ; mon cœur est en paix avec tous, et je pardonne à qui m’a fait mal. Je crois bien que ce pauvre Léonard et moi nous n’aurons pas mal de peines à endurer, au milieu d’étrangers, et étant obligés de nous cacher comme des voleurs de grand chemin. Mais je défie la malice du sort, quelle qu’elle soit, de nous pousser à rien de vicieux. C’est là la consolation qui nous soutiendra toujours contre les travers et les croix de ce malheureux monde.

» Que Dieu bénisse Votre Honneur !

» Ce sont là les vœux de votre humble serviteur, à vous obéir,

« Benjamin Hawkins. »


Je lus cette lettre avec une extrême attention, et elle me fit faire bien des retours sur le passé. Suivant moi, elle portait la vive empreinte d’une âme simple et droite.

C’est une réflexion bien triste, me disais-je à moi--