Page:Godwin - Caleb Williams, I (trad. Pichot).djvu/37

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

meurtrier. Heureusement que ma réputation en fait de courage est assez bien établie pour que le refus que je fais de votre cartel ne puisse m’exposer à rien de déshonorant. Je regarde comme un bonheur véritable que vous m’ayez trouvé seul dans notre entrevue d’hier. Cette circonstance m’a rendu absolument le maître de l’affaire. Si l’aventure venait à s’ébruiter, la manière dont tout s’est terminé entre nous serait connue en même temps que la provocation, et cela me suffit. Mais si le défi eût été public, toutes les preuves que j’ai pu donner jusqu’à présent de mon courage n’excuseraient pas ma modération actuelle, et, malgré tout mon désir de ne pas me battre, cela n’eût pas dépendu de moi. Que cela nous serve donc à tous les deux pour nous mettre en garde contre un premier mouvement, puisqu’il peut en résulter des conséquences qui forcent à verser du sang, et puisse le ciel vous rendre heureux avec une compagne dont je vous crois tout à fait digne ! »

J’ai déjà dit que ce ne fut pas là le seul exemple où, dans le cours de ses voyages, M. Falkland fit voir d’une manière éclatante qu’il n’avait pas moins de vertu que de courage. Il resta encore plusieurs années hors de son pays, et chaque jour ajoutait à l’estime qu’il avait acquise aussi bien qu’à l’opinion qu’on avait de son extrême délicatesse sur l’article de l’honneur. Enfin il jugea à propos de revenir en Angleterre, avec l’intention de passer le reste de ses jours dans la résidence de ses ancêtres.