Page:Goethe-Nerval - Faust Garnier.djvu/160

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Ces fleurs sont venues devant ma croisée ! tous les jours je les arrosais de mes pleurs : ce matin je les ai cueillies pour te les apporter.

Le premier rayon du soleil dans ma chambre me trouve sur mon lit assise, livrée à toute ma douleur !

Secours-moi ! sauve-moi de la honte et de la mort ! abaisse, ô mère de douleurs ! un regard de pitié sur ma peine !




La nuit. — Une rue devant la porte de Marguerite.


VALENTIN, soldat, frère de Marguerite.

Lorsque j’étais assis à un de ces repas où chacun aime à se vanter, et que mes compagnons levaient hautement devant moi le voile de leurs amours, en arrosant l’éloge de leurs belles d’un verre plein, et les coudes sur la table,… moi, j’étais assis tranquillement, écoutant toutes leurs fanfaronnades ; mais je frottais ma barbe en souriant, et je prenais en main mon verre plein. « Chacun son goût, disais-je ; mais en est-il une dans le pays qui égale ma chère petite Marguerite, qui soit digne de servir à boire à ma sœur ? » Tope ! tope ! cling ! clang ! résonnaient à l’entour. Les uns criaient : Il a raison, elle est l’ornement de toute la contrée ! Alors, les vanteurs restaient muets. Et maintenant !… c’est à s’arracher les cheveux ! à se jeter contre les murs ! Le dernier coquin peut m’accabler de plaisanteries, de nasardes ; il faudra que je sois devant lui comme un coupable ; chaque parole dite au hasard me fera suer à grosses gouttes ! et, dussé-je les hacher tous ensemble, je ne pourrais point les appeler menteurs. Qui vient là ? qui se glisse le long de la muraille ? Je ne me trompe pas, ce sont eux. Si c’est lui, je le punirai comme il mérite, il ne vivra pas longtemps sous les cieux.