Page:Goethe-Nerval - Faust Garnier.djvu/372

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dis que le fouet servait de conclusion à sa harangue, un jeune homme vif et de bonne humeur vient à passer sur la route ; une lyre résonne dans ses mains, et parmi ses cheveux blonds éclate une bandelette d’or. « Que veux-tu faire, dit-il, mon ami, d’un attelage aussi singulier ? Que signifie cette union bizarre d’un bœuf avec un oiseau ? Veux-tu me confier un instant ton cheval à l’essai, et tu verras un beau prodige. »

Le cheval est dételé, et le jeune homme saute sur sa croupe en souriant. À peine Pégase reconnaît-il la main du maître, qu’il mord fièrement son frein, prend son essor et lance des éclairs de ses yeux divins. Ce n’est plus un cheval, c’est un dieu qui s’élève au ciel avec majesté, et déployant ses ailes, se perd bientôt parmi les espaces azurés, où les yeux des humains ne peuvent plus le suivre.




À GŒTHE


Lorsqu’il traduisit pour le théâtre le Mahomet de Voltaire.

Et toi aussi, qui nous avais arrachés au joug des fausses règles pour nous ramener à la vérité et à la nature ; toi, Hercule au berceau, qui étouffas de tes mains d’enfant les serpents enlacés autour de notre génie, toi, depuis si longtemps, ministre d’un art tout divin, tu vas sacrifier sur les autels détruits d’une muse que nous n’adorons plus !

Ce théâtre n’est consacré qu’à la muse nationale, et nous n’y servirons plus des divinités étrangères ; nous pouvons maintenant montrer avec orgueil un laurier qui a fleuri de lui-même sur notre Parnasse. Le génie allemand a osé pénétrer dans le sanctuaire des arts, et, à l’exemple des Grecs et des Bretons, il a brigué des palmes incueillies.

N’essaye donc pas de nous rendre nos anciennes entraves par cette imitation d’un drame du temps passé ; ne nous rappelle pas les jours d’une minorité dégradante…