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Page:Goethe - Œuvres, trad. Porchat, tome II.djvu/160

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GŒTZ.

Il te faut toujours quelque chose à part… Weislingen, je reviens à l’instant. Il faut pourtant que je salue ma femme. Viens avec moi, Charles.

CHARLES.

Qui est cet homme ?

GŒTZ.

Dis-lui bonjour. Prie-le d’être gai.

CHARLES, tendant la main à Weislingen.

Tiens ! touche là ! Sois gai : le dîner est bientôt prêt.

WEISLINGEN. Il le prend dans ses bras et lui donne un baiser.

Heureux enfant, qui ne connaît de malheur que si la soupe se fait longtemps attendre ! Que Dieu vous donne beaucoup de joie en cet enfant, Berlichingen !

GŒTZ.

Où l’on voit beaucoup de lumière il y a plus d’ombre… Cependant ce serait mon bonheur. Nous verrons ce qui arrivera.

(Ils sortent.)
WEISLINGEN.

Oh ! si je m’éveillais, et que tout cela fût un songe !… Au pouvoir de Berlichingen, dont je m’étais à peine délivré ! dont j’évitais la pensée comme le feu ! que j’espérais de vaincre ! Et lui… l’ancien, le fidèle Gœtz ! Grand Dieu, comment, comment tout cela finira-t-il ? Adelbert, te voilà ramené dans cette salle, où notre enfance se livrait à ses jeux ; quand tu l’aimais, quand tu lui étais attaché comme à ton âme ! Qui peut l’approcher et le haïr ? Hélas ! je ne suis absolument rien ici ! Vous êtes passés, heureux temps, où le vieux Berlichingen était là, assis près de la cheminée, où nous prenions nos ébats autour de lui, et nous aimions comme des anges ! Combien l’évêque et mes amis vont être en peine ! Je le sais, tout le pays prendra part à mon malheur. Qu’importe ? Peuvent-ils me donner ce que je désire ?

GŒTZ, avec une bouteille de vin et des verres.

En attendant que le dîner soit prêt, nous boirons un coup. Venez, prenez place ; faites comme si vous étiez chez vous. Songez que vous êtes encore une fois chez Gœtz. Il y a longtemps que nous n’avons été assis à la même table ; longtemps