Page:Goethe - Œuvres, trad. Porchat, tome II.djvu/168

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OLÉARIUS.

Mais c’est loin de suffire. La vie de l’homme est courte, et, dans une seule génération, tous les cas ne se présentent point. Notre code est un recueil de ceux qui se sont rencontrés pendant plusieurs siècles. D’ailleurs la volonté et l’opinion des hommes est changeante ; l’un juge bon aujourd’hui ce que l’autre désapprouve demain : ainsi la confusion et l’injustice sont inévitables. Les lois fixent tout cela, et les lois sont invariables.

L’ABBÉ.

Cela vaut mieux assurément.

OLÉARIUS.

C’est ce que le peuple ne reconnaît pas. Tout avide qu’il est de nouveautés, il déteste souverainement l’innovation qui veut le tirer de son ornière, dût-il s’en trouver beaucoup mieux. Ils ont en horreur le juriste, autant qu’un perturbateur de l’État, un coupeur de bourses, et sont comme furieux, s’il en paraît un qui songe à s’établir chez eux.

LIEBETRAUT.

Vous êtes de Francfort ! J’y suis bien connu. Au couronnement de l’empereur Maximilien, nous avons bien trinqué à la santé de vos fiancés. Vous vous appelez Oléarius ! Je ne connais personne de ce nom.

OLÉARIUS.

Mon père s’appelait Œlmann[1]. C’est uniquement pour éviter la disconvenance sur le titre de mes ouvrages latins, qu’à l’exemple, et par les conseils de respectables légistes, je me nomme Oléarius.

LIEBETBAUT.

Vous avez bien fait de vous traduire. Nul n’est prophète dans le pays paternel : il aurait pu vous en arriver autant dans votre langue maternelle.

OLÉARIUS.

Ce n’était pas ma raison.

LIEBETRAUT.

Toutes choses ont deux raisons.

  1. Pressureur d’huile.