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Page:Goethe - Œuvres, trad. Porchat, tome II.djvu/174

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GŒTZ.

Dois-je dire oui pour vous ?

MARIE.

Si vous le dites avec moi.

GŒTZ.

C’est un bonheur que cette fois nos intérêts soient les mêmes. Tu n’as pas besoin de rougir : tes regards en disent assez. Eh bien, oui, Weislingen ! Donnez-vous la main, et je dis : Ainsi soit-il !… Mon ami et mon frère !… Je te remercie, ma sœur ! Tu sais mieux que filer du chanvre. Tu as préparé un fil pour attacher cet oiseau de paradis. Tu ne sembles pas tout à fait à ton aise, Adelbert ! Que te manque-t-il ? Moi, je suis parfaitement heureux. Ce que je n’espérais qu’en rêve, je le vois, et je crois rêver. Ah ! voilà mon songe vérifié. Cette nuit, il m’a semblé que je te présentais ma main de fer, et tu me la serras si fort, qu’elle tomba du brassard comme arrachée. Je fus effrayé et je m’éveillai. J’aurais dû prolonger mon rêve ; je t’aurais vu m’attacher au bras une nouvelle main vivante… À présent il te faut partir, pour mettre en bon état ton château et tes domaines. Cette maudite cour t’a fait négliger l’un et l’autre. Je vais appeler ma femme… Élisabeth !

MARIE.

Mon frère est au comble de la joie.

WEISLINGEN.

Et pourtant je le défie d’être aussi joyeux que moi.

GŒTZ.

Tu auras une agréable résidence.

MARIE.

La Franconie est un beau pays.

WEISLINGEN.

Et je puis dire que mon château se trouve dans la partie la plus belle et la plus agréable.

GŒTZ.

Oui, vous le pouvez et je puis le soutenir. Ici coule le Mein, et peu à peu s’élève la montagne, qui, revêtue de champs et de vignes, est couronnée par votre château ; puis la rivière se courbe brusquement autour du rocher qui porte votre manoir.