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Page:Goethe - Œuvres, trad. Porchat, tome II.djvu/268

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Cette vision manquait encore ! Elle meurt, Marie meurt, et se montre à moi… Laisse-moi, esprit bienheureux ! Je suis assez misérable.

MARIE.

Weislingen, je ne suis pas un esprit ; je suis Marie.

WEISLINGEN.

C’est sa voix.

MARIE.

Je viens implorer de toi la grâce de mon frère. Il est innocent, si coupable qu’il paraisse.

WEISLINGEN.

Silence, Marie ! Ange du ciel, tu apportes avec toi les tourments de l’enfer. Ne dis rien de plus.

MARIE.

Et mon frère devra mourir ? Weislingen, c’est affreux que j’aie besoin de te dire : « Il est innocent ! » que je doive pleurer, pour te détourner du meurtre le plus abominable. Ton âme est possédée, jusqu’en ses dernières profondeurs, par des puissances ennemies. Et voilà Adelbert !

WEISLINGEN.

Tu le vois, le souffle dévorant de la mort a passé sur moi ; mes forces penchent vers la tombe. Je mourais misérable, et tu viens me précipiter dans le désespoir. Si je pouvais parler, ta haine la plus forte se fondrait en pitié et en gémissements. Ô Marie ! Marie !

MARIE.

Weislingen, mon frère est malade en prison. Ses graves blessures, son âge !… Et, si tu pouvais souffrir que sa tête grise… Weislingen, nous serions au désespoir.

WEISLINGEN.

Il suffit. (Il sonne. Franz se présente dans une extrême agitation.)

FRANZ.

Monseigneur ?…

WEISLINGEN.

Ces papiers-là, Franz. (Franz les lui remet.)

WEISLINGEN. Il ouvre un paquet et montre un papier à Marie.

Voici la sentence de mort de ton frère : elle est signée.

MARIE.

Dieu du ciel !