Page:Goethe - Œuvres, trad. Porchat, tome II.djvu/297

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laisse tomber l’écheveau, et va se mettre à la fenêtre ; Claire achève la chanson ; la mère lui témoigne, par signes, un peu de mécontentement : elle se lève, fait quelques pas vers Brackenbourg, revient, comme indécise, et s’assied. )



LA MÈRE.

Qu’y a-t-il dans la rue, Brackenbourg ? J’entends marcher.

BRACKENBOURG.

C’est la garde de la gouvernante.

CLAIRE.

A cette heure ? Qu’est-ce que cela veut dire ? ( Elle se lève et va se mettre à la fenêtre, à coté de Brackenbourg.) Ce n’est pas la garde ordinaire : ils sont beaucoup plus nombreux. Presque toutes leurs troupes ! O Brackenbourg, allez, allez savoir ce que c’est. Ce doit être quelque chose de particulier. Allez, mon cher Brackenbourg ; faites-moi ce plaisir.

BRACKENBOURG.

J’y vais, et je reviens à l’instant ! ( A sa sortie, il lui tend la main ; elle lui donne la sienne.) •,

LA MÈRE.

- Tu le renvoies déjà !

CLAIRE.

Je suis curieuse ; et puis, ne vous en.lâchez pas, sa présence me fait mal. Je ne sais jamais comment je dois agir avec lui. J’ai des torts à son égard, et cela me ronge le cœur, qu’il le sente si vivement…. Cependant je n’y puis rien changer !

LA MÈRE.

C’est un si honnête garçon !

CLAIRE.

Aussi ne puis-je^n’empêcher de l’accueillir amicalement. Ma main se serre bien souvent par mégarde, quand la sienne me presse si doucement, si tendrement. Je me reproche de le tromper, de nourrir dans son cœur une vaine espérance. Cela me fait mal. Dieu sait que je ne le trompe pas. Je ne veux pas qu’il espère, et pourtant je ne puis le laisser se désespérer.

LA MÈRE.

Cela n’est pas bien.

CLAIRE.

Je le voyais avec plaisir, et je lui veux encore du bien dans