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Page:Goethe - Œuvres, trad. Porchat, tome II.djvu/321

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comme insignifiant aucun coup de l’adversaire ; et, de même que des hommes oisifs s’occupent avec le plus grand soin des secrets de la nature, je regarde comme le devoir, comme la vocation d’un prince de connaître les sentiments, les desseins de tous les partis. J’ai sujet de craindre un éclat. Le roi a longtemps agi d’après certains principes ; il voit que par là il n’atteint pas son but : quoi de plus vraisemblable que de le voir essayer un autre chemin ?



EGMONT.

Je ne crois pas. Lorsqu’on vieillit, et qu’on a essayé tant de choses, sans pouvoir jamais régler le monde, on doit enfin en avoir bien assez.

ORANGE.

Il est une chose qu’il n’a pas encore tentée.

EGMONT.

Quoi donc ?

ORANGE.

D’épargner le peuple et de frapper les princes.

EGMONT.

Que de gens ont eu dès longtemps cette crainte ! Vaine inquiétude !

ORANGE.

Autrefois c’était une inquiétude : peu à peu elle est devenue pour moi une conjecture, et enfin une certitude.

EGMONT.

Et le roi a-t-il de plus fidèles serviteurs que nous ?

ORANGE.

Nous le servons à notre manière ; et nous pouvons avouer entre nous que nous savons bien peser les droits du prince et les nôtres.

EGMONT.

Qui n’en fait pas autant ? Nous lui sommes dévoués et soumis en ce qui lui appartient.

ORANGE.

Mais s’il s’arrogeait davantage, et s’il nommait trahison ce que nous appelons maintien de nos droits ?

EGMONT.

Nous pourrons nous défendre. Qu’il assemble les chevaliers de la Toison et qu’on nous juge.



ORANGE.