Page:Goethe - Œuvres, trad. Porchat, tome II.djvu/430

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Laisse-moi, ma chère Marie.

MARIE.

Si je suis ta chère Marie, dis-moi ce que tu as sur le cœur.

SOPHIE.

Laisse-le." Les hommes font souvent de ces figures, sans avoir pour cela quelque chose sur le cœur.

v MARIE.

)

Non, non ! Ah ! il y a peu de temps que je connais ton visage, mais déjà il me révèle tous tes sentiments ; je lis sur ton front chaque mouvement de cette âme pure et sincère. Quelque chose te saisit. Parle, dis-moi ce que c’est

BEAUMARCHAIS.

Ce n’est rien, mes amies. J’espère au fond que ce n’est rien. Clavijo….

MARIE.

Eh bien ?

BEAUMARCHAIS.

Je viens de chez Clavijo : il n’est p :as chez lui.

■ SOPHIE.

Et cela te trouble ?

BEAUMARCHAIS.

Son portier dit qu’il est parti, il ne sait pour quel endroit ; personne ne sait pour combien de temps. S’il nous fermait sa porte ? S’il était réellement parti ?… Dans quel dessein ? Pourquoi ? ’

MARIE.

Eh bien, attendons.

BEAUMARCHAIS.

Tes lèvres mentent. Ah ! la pâleur de tes joues, le tremblement de tes membres, tout parle et témoigne que tu ne peux attendre. Chère sœur ! (Il la prend dans ses bras.) Par ce cœur palpitant, frémissant d’angoisse, je te jure !… Écoute-moi, Dieu juste !… Anges du ciel, écoutez-moi ! Tu seras vengée, s’il…. Mes sens s’égarent à cette pensée…. s’il retombait, s’il se rendait deux fois coupable d’un horrible parjure, se moquait de notre douleur…. Non, c’est… c’est impossible, impossible…. Tu seras vengée.



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