l’image de la vertu ; qui lui apprit à connaître le charme suprême du plus pur amour ; qui était pour lui une divinité, une maîtresse, un ami, tout enfin : maintenant si avilie ! Cela me fait frémir ! A la vérité, ces sublimes idées sont assez loin de moi ; je consens qu’elle ne soit qu’une femme comme les autres. Mais tant de bassesse !… Cela pousse à la rage. Mon cœur obstiné parie encore pour elle. Quelle faiblesse ! Ne peux-tu donc prendre cela sur toi ? Saisis la belle chance qui se présente. Une femme incomparable, que tu aimes avec ardeur, a besoin d’argent ! Vite, Alceste, le denier que tu dormes te rapporte un écu. Maintenant elle l’a pris elle-même…. Bien ! Qu’elle vienne encore à moi avec sa vertu ! Va, affermis seulement ton cœur ; dis-lui de sang-froid : « Il vous faut peut-être un peu d’argent comptant ? Bon ! Ne me le taisez pas. Usez sans géne de mon bien. Ce qui est à moi est aussi à vous….» Elle vient !… Ma fausse tranquillité disparaît tout à coup : tu crois qu’elle a pris l’argent, et pourtant tu l’en crois incapable !
SCÈNE VIII.
ALCESTE, SOPHIE.
SOPHIE.
Que faites-vous, Alceste ? Vous, semblez me fuir !… La solitude a-t-elle donc tant d’attraits pour vous ?
ALCESTE.
Pour cette fois, je ne sais ce qui m’attirait particulièrement. Il se fait sans beaucoup de raison plus d’un monologue.
SOPHIE.
A la vérité, la perte est grande et a droit de vous chagriner.
ALCESTE. ’
Ah ! elle est insignifiante et ne me tient pas au cœur. Nous en avons assez. Qu’est-ce qu’un peu d’argent ? Qui sait s’il n’est pas tombé en bonnes mains ?
SOPHIE.
Oui, votre bonté ne nous laisse pas en prendre du chagrin.
ALCESTE.
Avec un peu de franchise on pouvait tout éviter.