peuple ? Elles chargeront tes membres, elles battront bruyamment de çà et de là, et leur cliquetis accompagnera ta marche. Mais qu’ai-je besoin de chaînes ? Tu es convaincu ! Tu es jugé ! Là-haut, des rochers s’avancent en saillie sur la terre et la mer : de là nous précipitons avec justice le furieux qui, comme l’animal, comme les éléments, court et se précipite avec insolence dans les derniers égarements. (Il le laisse aller.) À présent je te relâche. Fuis ! Va-t’en bien loin ! Tu trouveras en toi-même le repentir ou le supplice.
Tu crois donc, mon père, que tout est fini ? Tu me frappes avec des lois inflexibles, et ne tiens nul compte de la puissance infinie qui m’a plongé du bonheur dans l’infortune ?… Quelle est cette femme ici prosternée, affligée et sanglante ? C’est la souveraine qui me tenait sous sa loi. Les mains se tordent, les bras s’agitent : ce sont les mains et les bras qui m’ont enveloppé. Pourquoi ces lèvres tremblantes ? Pourquoi ce sein palpitant ? Témoins muets d’un perfide, oui, d’un perfide plaisir ! Ce qu’elle m’avait donné avec tendresse, elle l’accorde à un second… à un troisième peut-être. Maintenant, mon père, dis-moi, qui donna à la beauté la puissance unique, redoutable, suprême ? Qui l’amena en silence, par un chemin secret, du haut de l’Olympe ? du sein de l’enfer ? Tu échapperais bien plutôt à l’inflexible destinée qu’à ce regard qui nous perce et nous dévore ; au danger pressant de la mort qu’aux tresses et aux anneaux de cette chevelure ; au sable mobile du désert qu’aux légers tourbillons de cette robe flottante (Épiméthée a relevé Épimélie ; il la promène en la consolant, de sorte que les attitudes de la jeune fille répandent aux paroles de Philéros.) Dis-moi, est-ce Pandore ? Tu la vis un jour, fatale aux pères, funeste aux fils. Vulcain la forma avec de brillants dehors, et les dieux logèrent la ruine au dedans. Comme le vase brille ! Quelle pose élégante ! C’est ainsi que les cieux offrent une boisson enivrante ! Que recèle cet air timide ? Les actes audacieux. Et le sourire, la tendresse, que recèlent-ils ? La trahison. Ces regards célestes ? Une mortelle moquerie. Ce sein de déesse ? Un cœur cynique.
Oh ! dis-moi que j’ai menti ! dis qu’elle est pure ! La folie me sera plus chère que la raison. De la folie à la raison, quel