Page:Goethe - Œuvres, trad. Porchat, tome III.djvu/28

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Marianne.

Cher frère, pardonne-moi. Je t’en prie par tout au monde. Tu es fâché : je le pensais bien. J’ai fait une sottise… Je ne sais où j’en suis.

Guillaume. Il se recueille.

Qu’as-tu, ma fille ?

Marianne.

Je voudrais pouvoir te conter… Cela est si confus dans ma tête… Fabrice me veut pour femme, et moi…

Guillaume, avec un peu d’amertume.

Parle franchement : tu consens ?

Marianne.

Non ! plutôt mourir ! Jamais je ne l’épouserai. Je ne peux l’épouser.

Guillaume.

Voilà un langage bien différent !

Marianne.

Et assez étrange ! Tu es bien peu gracieux, mon frère ; je m’en irais volontiers, et j’attendrais une heure favorable, si je n’avais pas besoin de soulager mon cœur sur-le-champ. Une fois pour toutes, je ne puis épouser Fabrice.

Guillaume.. Il se lève et prend Marianne par la main.

Comment, Marianne ?

Marianne.

Il était là, et il a tant parlé, et m’a représenté tant de choses, que je me suis imaginé que c’était possible. Il me pressait et je lui ai dit, dans mon étourderie, qu’il devait te parler… Il a pris cela pour un consentement, et à l’instant j’ai senti que cela ne pouvait être.

Guillaume.

Il m’a parlé.

Marianne.

Je t’en prie de toutes mes forces, avec tout l’amour que j’ai pour toi, par tout l’amour que tu me portes, répare cela ; fais-le-lui entendre.

Guillaume, à part.

Grand Dieu !

Marianne.

Ne sois pas fâché ! Qu’il ne soit pas non plus fâché ! Nous