lui-là ! Oh ! pardonne ! Ainsi que l’homme égaré par de vains prestiges est aisément et doucement guéri par l’approche de la divinité, je fus de même guéri de toute fantaisie, de tout égarement, de tout désir trompeur, aussitôt que mon regard eut rencontré le tien. Tandis qu’auparavant mes vœux sans expérience s’égaraient entre mille objets, pour la première fois, je rentrai avec confusion en moi-même, et j’appris à connaître le bien désirable. C’est ainsi qu’on cherche vainement, dans le vaste sable des mers, une perle, qui repose cachée dans l’écaille, sa retraite solitaire.
Alors commencèrent de beaux jours, et, si le duc d’Urbin ne nous avait pas enlevé ma sœur, les années se seraient écoulées pour nous dans un bonheur pur et charmant. Mais hélas ! il nous manque trop aujourd’hui, le caractère enjoué, le cœur plein de force et de vie, l’esprit fécond de cette aimable femme.
Je ne le sais que trop, depuis le jour où elle quitta ces lieux, personne n’a pu te rendre la joie pure. Que de fois cette pensée a déchiré mon cœur ! Que de fois, à ton sujet, ai-je confié mes plaintes aux bois silencieux ! « Hélas ! m’écriais-je, la sœur a-t-elle donc seule le bonheur, le droit, d’être appréciée de cette femme chérie ? N’est-il donc plus de cœur qui mérite qu’elle veuille se confier à lui ? N’est-il plus aucune âme qui réponde à la sienne ? L’esprit et l’enjouement sont-ils éteints ? Et cette seule femme, si excellente qu’elle fût, était-elle donc tout ? » Ô princesse, pardonne ! je pensais alors quelquefois à moi-même, et je souhaitais de pouvoir être quelque chose pour toi ; bien peu sans doute, mais quelque chose ; je souhaitais de l’être non pas en paroles, mais en effet, et de te montrer, dans la vie, comme mon cœur s’est consacré à toi en secret. Mais cela ne m’a point réussi, et je n’ai fait que trop souvent, par erreur, ce qui devait t’affliger ; j’offensais l’homme que tu protégeais ; j’embrouillais, par imprudence, ce que tu voulais démêler ; et, dans le moment où je voulais m’approcher, je me sentais plus loin, toujours plus loin.
Ami, je n’ai jamais méconnu tes intentions, et je sais comme