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Page:Goethe - Œuvres, trad. Porchat, tome III.djvu/400

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je vous demande à tous deux le silence. Que nul n’apprenne ce qui s’est passé entre nous. L’envie est aux aguets ; elle soulève bien vite flot sur flot, tempête sur tempête ; elle pousse le navire contre les âpres rochers, où le pilote lui-même ne saurait le sauver. Le mystère protége seul nos actions. Un projet communiqué n’est plus à nous ; le hasard se joue dès lors de notre volonté. Celui même qui peut commander doit surprendre. Oui, avec la meilleure volonté, nous faisons bien peu, parce que mille volontés nous traversent. Ah ! si, avec mes intentions pures, la force pleine m’était aussi donnée pour un peu de temps, on ressentirait jusqu’au dernier foyer du royaume les soins zélés du père ; des heureux habiteraient sous l’humble toit ; des heureux habiteraient dans le palais ; et, quand j’aurais une fois joui de leur félicité, volontiers je renoncerais au trône, je renoncerais au monde ! (Il s’éloigne.)




SCÈNE VI.

LE DUC, EUGÉNIE.

EUGÉNIE.

Oh ! quel jour de bonheur et d’allégresse !

LE DUC.

Oh ! puissé-je n’en voir que de pareils !

EUGÉNIE.

De quel bonheur céleste le roi nous a comblés !

LE DUC.

Jouis purement de grâces si inattendues.

EUGÉNIE.

Il ne semble pas heureux, hélas ! et il est si bon !

LE DUC.

La bonté elle-même éveille souvent la résistance.

EUGÉNIE.

Qui. est assez dur pour lui résister ?

, LE DUC.

Celui qui attend de la sévérité le salut de l’État.

EUGÉNIE.

La douceur du roi devrait produire la doueeur.