Page:Goethe - Œuvres, trad. Porchat, tome III.djvu/439

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prudence, agir avec sagesse. Une noble enfant a été abandonnée, pour la vie et la mort, est-ce trop dire ’î abandonnée à ton caprice. Et cbacun, employés, hommes de guerre, citoyens, tous, ont l’ordre de te soutenir, et de traiter cette jeune fille comme il te plaira de l’ordonner. (Il lui rend la feuille.)




LA GOUVERNANTE.

Ici encore montre-toi juste, et ne laisse pas ce papier parler seul comme accusateur ! Écoute-moi aussi favorablement, moi, sévèrement accusée ; écoute mon récit sincère. Cette excellente jeune fille est née d’un noble sang ; la nature lui a fait .la part la plus belle de chaque don, de chaque vertu, si la loi lui refuse d’autres avantages : et maintenant elle est bannie ! J’ai du l’éloigner du milieu des siens, l’amener ici et la conduire aux îles.

LE CONSEILLER.

A une mort certaine, qui la surprendra furtivement dans les émanations de vapeurs brûlantes ! Là cette fleur céleste se flétrira, les couleurs de ces joues s’effaceront, et elle disparaîtra cette beauté, que l’œil souhaite, avec amour, de contempler sans cesse.

LA GOUVERNANTE.

Avant de juger, écoute encore. Cette enfant est innocente…. Est-il besoin de l’affirmer ?… Mais elle est la cause de beaucoup de maux. Un dieu irrité la jeta, comme une pomme de discorde, au milieu de deux partis qui se combattent, divisés maintenant pour jamais. L’un prétend qu’elle a droit à la plus haute fortune ; l’autre s’efforce de la rabaisser. Tous deux sont résolus. Ainsi un secret labyrinthe de menées subtiles a enveloppé doublement sa destinée ; la ruse a contre-balancé la ruse, jusqu’au jour où la passion, ne se possédant plus, a pressé enfin le moment d’une victoire décisive. Alors, des deux parts, on a brisé la barrière de la dissimulation ; une violence, dangereuse même pour l’État, a éclaté avec menace ; et, pour arrêter soudain, pour étouffer de criminels attentats, un arrêt suprême des dieux de la terre frappe mon élève, cause innocente du combat, et m’entraîne avec elle dans l’exil.

LE CONSEILLER.

Je ne condamne point l’instrument ; je conteste à peine avec