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Page:Goethe - Œuvres, trad. Porchat, tome IV.djvu/146

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chose, qui, assez follement, n’ont pas gardé ce qu’ils avaient dans le cœur, et ont découvert à la multitude leurs sentiments, leurs vues, on les a de tout temps crucifiés et brûlés. Excusez-moi, mon ami, la nuit est avancée : nous en resterons là pour cette fois.

WAGNER.

J’aurais volontiers prolongé la veille, pour continuer avec vous ce docte entretien. Mais demain, comme premier jour de Pâques, vous me permettrez une ou deux questions. Je me suis appliqué avec zèle à l’étude ; je sais beaucoup, il est vrai, mais je voudrais tout savoir. (Il se retire.’)

FAUST, seul.

Comme il conserve toujours une lueur d’espérance, l’esprit qui s’attache incessamment à des sujets insipides ; qui fouille de ses mains avides pour chercher des trésors, et se réjouit lorsqu’il trouve un vermisseau !

La voix d’un tel homme ose-t-elle bien se faire entendre dans ce lieu où m’environnait la foule des esprits ? Cependant, hélas ! pour cette fois, je te remercie, ô le plus misérable de tous les fils de la terre : tu m’as arraché au désespoir, qui était sur le point de troubler mes sens. Ah1 l’apparition était si colossale, que j'ai dû véritablement me sentir un nain devant elle.

Moi, l’image de Dieu, qui déjà croyais toucher au miroir de l’éternelle vérité ; qui jouissais de moi-même dans la lumière et la splendeur du ciel, et avais dépouillé ma nature terrestre ; moi, plus qu^chérubin, dont la force libre osait déjà, pleine d’espérance, se répandre dans les veines de la nature, et, devenue créatrice, goûter la vie des dieux : combien dois-je expier mon audace ! Une parole foudroyante m’a emporté bien loin.

Je ne dois pas me permettre de rti’égaler à toi. Si j’ai eu la force de t’évoquer, je n’ai pas eu la force de te retenir. Dans ce moment délicieux, je me sentais si petit, si grand ! Tu m’as repoussé cruellement dans l’incertaine destinée de l’humanité. Qui m’instruirai Que dois-je éviter ? Dois-je obéir à cette impulsion ? Ah ! nos actions elles-mêmes, aussi bien que nos souffrances, arrêtent la marche de notre vie.

Aux conceptions, même les plus magnifiques, de l’esprit s’at-