Page:Goethe - Œuvres, trad. Porchat, tome IV.djvu/22

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le roi punit cruellement l’émissaire assassin, croyant tuer le fils de son frère. 11 apprend trop tard qui meurt dans les tourments, devant ses yeux ivres de fureur, et, pour assouvir dans son cœur le désir de la vengeance, il médite’en.silence un crime inouï. Il paraît tranquille, indifférent et réconcilié, et attire de nouveau Thyeste, avec ses deux fils, dans le royaume ; il saisit les enfants, les égorge, et sert à leur père, dans le premier festin, ce mets horrible, épouvantable. Et, lorsque Thyeste s’est rassasié de sa propre chair, qu’une tristesse le prend, qu’il demande ses fils ; qu’il croit déjà entendre les pas, la voix des enfants à la porte de la salle, Atrée, avec un rire affreux, lui jette les têtes et les pieds des victimes…. 0 roi, tu détournes le visage avec horreur : ainsi le soleil détourna sa face et son char de l’ornière éternelle. Tels sont les aïeux de ta prêtresse ; et la nuit couvre de ses ailes pesantes beaucoup de funestes aventures de ces .princes, beaucoup d’actes d’un sens égaré, et ne nous en laisse apercevoir que la sinistre lueur.

THOAS.

Que ton silence les cache également. Assez d’horreurs ! Dis maintenant par quel prodige tu sortis de cette tige sauvage.

IPHIGÉNIE.

Le fils aîné d’Atrée était Agamemnon. C’est mon père. Mais, je puis le dire, j’ai vu en lui^ dès mon premier âge, un modèle de l’homme accompli. Je fus le premier gage d’amour que lui donna Clytemnestre ; Electre vit ensuite le jour. Le roi régnait en paix, et la maison de Tantale jouissait d’une tranquillité qu’elle avait longtemps ignorée. Mais au bonheur des parents il manquait encore un fils, et, à peine fut accompli ce désir de voir désormais Oreste, l’enfant chéri, grandir entre ses deux sœurs, qu’un nouveau malheur menaçait déjà cette maison tranquille . 11 est venu jusqu’à vous le bruit de là guerre, qui, pour venger l’enlèvement de la plus belle des femmes, a fait camper autour des murs de Troie toute la puissance des princes de la Grèce. Ont-ils conquis la ville, ont-ils atteint le but de leur vengeance, je ne l’ai pas appris. Mon père commandait l’armée des Grecs. Ils attendaient vainement en Aulide un vent favorable : car Diane, irritée contre leur grand chef, retenait les guerriers impatients, et demandait, par la bouche de Calchas, la