Page:Goethe - Œuvres, trad. Porchat, tome IV.djvu/406

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rends-lui la liberté ; que nul opprobre n’atteigne l’homme égaré par les dieux.

FAUST.

O reine, je vois tout ensemble, avec étonnement, celle qui frappe d’un trait inévitable et ici celui qui est frappé ; je vois l’arc qui a lancé la flèche et là le blessé. Les traits suivent les traits et me percent. De toutes parts je crois entendre les flèches empennées siffler à travers le château et l’espace. Que suis-je maintenant ? Tu rends tout d’un coup les plus fidèles serviteurs rebelles à mes lois et mes murailles mal sûres. Aussi, déjà je le crains, mon armée obéit à la femme victorieuse, invincible. Que me reste-t-il à faire que de te livrer et ma personne et tout ce que je croyais être à moi ? A tes pieds, laisse-moi, libre et fidèle, te reconnaître pour souveraine, toi qui n’as eu qu’à paraître pour conquérir l’empire et le trône.

LyncÉe, portant une cassette, et suivi d’hommes qui en portent d’autres.

O reine, tu me vois revenir. Le riche mendie un regard : il te voit, et il se sent aussitôt pauvre comme un mendiant et riche comme’un prince.

Qu’étais-je d’abord ? Que suis-je maintenant ? Que faut-il vouloir ? Que faut-il faire ? Que sert l’éclair du regard le plus perçant ? Il rejaillit de ton trône.

Nous arrivâmes de l’orient, et l’occident succomba. C’était un long et large torrent de peuples…. le premier ne savait rien du dernier.

Le premier tomba, le second resta debout, le troisième tenait sa lance prête ; chacun était soutenu par cent autres ; mille succombaient inaperçus.

Nous avancions, nous poursuivions notre course orageuse ; nous fûmes maîtres de lieux en lieux ; où je commandais en maître aujourd’hui, un autre pillait et volait demain.

Nos yeux passaient tout en revue ; c’était vite fait : l’un prenait la plus belle femme, l’autre le taureau à la marche assurée ; tous les chevaux devaient nous suivre.

Pour moi, j’aimais à déterrer ce qui s’était jamais vu de plus rare ; et ce qu’un autre possédait aussi était pour moi de l’herbe sèche.