Page:Goethe - Œuvres, trad. Porchat, tome IV.djvu/432

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FAUST.

Grande erreur ! Celui qui est appelé à commander doit trouver le bonheur dans le commandement. Son cœur est plein d’une haute volonté ; mais, ce qu’il veut, nul homme ne doit l’approfondir. Ce qu’il a soufflé à l’oreille de ses plus fidèles s’accomplit, et tout le monde s’étonne. De la sorte il sera toujours le très-auguste, le plus digne…. La jouissance rend vulgaire.

MÉPHISTOPHÉLÈS.

Ce n’est pas là notre homme ! Il a joui de la vie et comment !… Cependant l’empire est tombé dans une anarchie, où grands et petits se sont fait la guerre de tous côtés ; les frères se chassaient, s’égorgeaient ; château contre château, ville contre ville ; les corporations en guerre avec la noblesse, l’évêque avec le chapitre et la commune. Tout ce que je voyais n’était qu’ennemis. Dans les églises, le meurtre et l’assassinat ; devant les portes, tout marchand et tout voyageur perdu ; et chez tous l’audace ne faisait pas peu de progrès, car c’était vivre que de se défendre. Enfin cela marchait.

FAUST.

Cela marcha, boita, tomba, se releva, puis cela fit la culbute, et roula pêle-mêle lourdement.

MÉPHISTOPHÉLÈS.

Et nul n’osait blâmer cet état de choses. Chacun pouvait, chacun voulait avoir du crédit. Le plus petit lui-même passait pour un grand personnage. Mais enfin cela parut aux meilleurs par trop extravagant. Les habiles se levèrent en force et dirent : « Le souverain, c’est celui qui nous donne le repos ; l’empereur ne le peut, ne le veut pas : élisons un nouvel empereur ; rendons la vie à l’empire. Tandis que le maître donnera à chacun la sécurité, unissons ensemble, dans un monde renouvelé, la paix et la justice. »

FAUST.

Cela sent bien le prêtre.

MÉPHISTOPHÉLÈS.

Aussi étaient-ce des prêtres. Ils mettaient à l’abri leurs ventres bien nourris ; ils étaient plus intéressés à l’affaire que les autres. La révolte grandit, la révolte fut sanctifiée ; et notre