Page:Goethe - Œuvres, trad. Porchat, tome IV.djvu/437

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et vagabonde : soudain, à l’improviste, un nouvel empereur s’est avancé, et, par les chemins prescrits, la multitude marche à travers la plaine ; tous suivent les drapeaux menteurs qui se déploient…. Nature de moutons !

L’empereur.

Un anti-César s’avance pour mon avantage. Maintenant, pour la première fois, je sens que je suis empereur. C’est seulement comme soldat que j’avais pris les armes : à cette heure, j’en suis revêtu pour un but plus élevé. Dans chaque fête, si brillante qu’elle fût, et quoiqu’on n’eût épargné rien, le danger me manquait. Tous tant que vous êtes, vous me conseilliez les courses de bagues : le cœur me battait ; je ne respirais que tournois, et, si vous ne m’aviez pas déconseillé la guerre, je serais illustre aujourd’hui par d’éclatants exploits. Je sentis sur mon cœur le sceau de l’indépendance, quand je vis mon image dans le royaume du feu. L’élément s’élança sur moi avec fureur : ce n’était qu’une illusion, mais l’illusion était sublime. Dans mon trouble, je rêvai de victoire et de renommée : je répare ce que j’ai à grand tort négligé. (Les hérauts sont expédiés pour aller provoquer l’anti-César. Faust paraît, couvert d’une armure et la visière à demi baissée ; les trois vaillants le suivent, équipés et vêtus comme on l’a dit plus haut.)

Faust.

Nous paraissons devant toi, et nous espérons n’encourir aucun blâme. Même sans nécessité, la prévoyance a son prix. Tu sais que le peuple des montagnes est subtil et réfléchi ; qu’il est versé dans le langage de la nature et des rochers. Les esprits, dès longtemps ravis à la plaine, sont plus que jamais voués à la montagne. Ils agissent en silence à travers les tortueuses crevasses, dans le noble gaz des riches vapeurs métalliques ; dans leurs analyses, leurs tentatives, leurs combinaisons perpétuelles, leur unique désir est de trouver du nouveau. Avec la main subtile des puissances invisibles, ils construisent des formes transparentes ; puis, dans le cristal et son éternel silence, ils voient les événements du monde supérieur. L’empereur.

J’ai compris et je te crois. Mais, vaillant homme, dis-moi, que nous fait ici tout cela ?