Page:Goethe - Œuvres, trad. Porchat, tome IX.djvu/134

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A Vérone, le mouvement de la population est très-animé; quelques rues, dans lesquelles les boutiques et les ateliers se touchent, offrent surtout un coup d’œil fort gai. Point de porte devant la boutique ou la chambre de travail; non, la maison est ouverte dans toute sa largeur; on voit jusqu’au fond et tout ce qui s’y passe. Les tailleurs cousent, les cordonniers tirent le fil et frappent, tous, à moitié dans la rue; les boutiques font même partie de la rue. Le soir, aux lumières, le spectacle est des plus vivants. Les jours de marché, les places sont combles : des montagnes de légumes et de fruits; l’ail et l’oignon à cœur joie. Du reste on crie, on folâtre, on chante tout le jour; on se pousse, on se chamaille, on huche et l’on rit sans cesse. La douceur de l’air, le bas prix des subsistances, rendent la vie facile. Tous ceux qui le peuvent sont en plein air. La nuit, les chants et le vacarme redoublent. J’entends chanter Malbrough dans toutes les rues; puis, c’est un tympanon, un violon. On s’exerce à imiter en sifflant tous les oiseaux. Les sons les plus étranges éclatent de toutes parts. Cette surabondance de vie, un doux climat la communique même à la pauvreté, et l’ombre du peuple semble même encore digne de respect.

De là viennent aussi ces habitations malpropres et peu commodes dont nous sommes si choqués. Ils sont toujours dehors, et, dans leur insouciance, ils ne songent à rien. Pour ce peuple,