Page:Goethe - Œuvres, trad. Porchat, tome IX.djvu/216

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mangeant du raisin que nous avions acheté dans le voisinage, allant et venant au soleil, et, quand nous l’avons trouvé trop chaud, à l’abri du grand obélisque dont l’ombre est assez large pour deux. Puis nous sommes allés à la chapelle Sixtine, que nous avons aussi trouvée pleine de lumière, et les tableaux bien éclairés. Le Jugement dernier et les divers tableaux du plafond, par Michel-Ange, se sont partagé notre admiration : je n’ai pu que regarder et m’étonner.

La sûreté et la vigueur du maître, sa grandeur, vont au delà de toute expression. Après avoir tout vu et revu, nous avons quitté ce sanctuaire et nous nous sommes rendus à l’église de Saint-Pierre, qui recevait du ciel serein la plus belle lumière, et paraissait claire et brillante dans toutes ses parties. Nous avons admiré, en gens qui veulent jouir, cette pompe et cette grandeur, sans nous laisser troubler cette fois par un goût trop dédaigneux et trop savant, et nous avons étouffé tout jugement trop sévère. Nous nous sommes délectés à contempler le délectable.

Enfin nous sommes montés sur le toit de l’église, où l’on trouve en petit l’image d’une ville bien bâtie : des maisons et des magasins, des fontaines, qui semblent jaillir, des églises et un grand temple, le tout en l’air et entremêlé de belles promenades. Nous sommes montés sur la coupole, et nous avons contemplé la contrée des Apennins brillante de lumière, le Soracte, les collines volcaniques de Tivoli, Frascati, Castel Gandolfo et la plaine, et plus loin, la mer ; à nos pieds, la ville de Rome, dans toute son étendue, avec ses palais sur les collines, ses coupoles, etc. Pas un souffle de vent, et, dans la lanterne de cuivre, il faisait chaud comme dans une serre. Après avoir bien observé tout cela, nous sommes descendus : on nous a ouvert les portes des entablements de la coupole, du tambour et de la nef ; on peut en faire le tour et observer d’en haut ces parties et l’église. Gomme nous étions sur la corniche du tambour, nous avons vu passer là-bas le Pape, qui allait faire ses dévotions de l’après-midi. C’était avoir vu au complet l’église de Saint-Pierre. Nous sommes redescendus tout de bon ; nous avons pris un joyeux et frugal repas dans une auberge voisine, puis nous sommes allés à Sainte-Cécile.