Page:Goethe - Œuvres, trad. Porchat, tome IX.djvu/420

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Dimanche, 22 juillet.

J’ai dîné chez Angélique. Il est passé en coutume que je suis son hôte le dimanche. Avant dîner nous sommes allés au palais Barberini pour voir l’excellent Léonard de Vinci et la maîtresse de Raphaël peinte par lui-même. 11 est fort agréable de voir les tableaux avec Angélique, parce que son œil est très-exercé et sa connaissance du métier très-grande. Avec cela, elle est très-sensible à tout ce qui est beau, vrai et tendre, et d’une incroyable modestie.

Après midi je suis allé chez le chevalier d’Agincourt, riche Français, qui emploie son temps et son argent à écrire une histoire de l’art depuis son déclin jusqu’à sa renaissance. Les collections qu’il a faites sont extrêmement intéressantes. On voit comme l’esprit humain n’a pas cessé d’être actif pendant les temps de ténèbres. Si l’ouvrage s’achève, il sera très-remarquable.

Rome, lundi 23 juillet.

Je suis monté ce soir sur la colonne Trajane pour jouir d’une vue inestimable. Delà, au coucher du soleil, le Golisée produit un effet magnifique avec le Capitule, qui est tout près, le Palatin, derrière, et la ville, qui s’y rattache. Je ne suis rentré que tard et lentement en parcourant la ville. Un objet remarquable est la place du Monte Cavallo avec l’obélisque.

Rome, mardi 24 juillet 1787.

Je suis allé à la villa Patrizzi pour voir coucher le soleil, jouir de la fraîcheur, graver dans mon esprit l’image de la grande cité, étendre et simplifier mon horizon par les longues lignes du paysage, enfin l’enrichir par une multitude d’objets beaux et divers. Ce soir, j’ai vu la place de la colonne Antonine, le palais Chigi, éclairés parla lune, et la colonne, noire de vétusté, se détachant sur le fond plus clair du ciel nocturne, avec son blanc piédestal étincelant. Et quelle foule innombrable de belles choses ne rencontre-t-on pas encore dans une pareille promenade ! Mais qu’il est difficile de s’approprier seulement une faible portion de tout cela ! Il y faut une vie d’homme, et même la vie de beaucoup d’hommes, qui s’instruisent graduellement les uns par les autres.