Page:Goethe - Œuvres, trad. Porchat, tome IX.djvu/429

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Rome, 18 août 1787.

Cette semaine, j’ai dû me relâcher un peu de mon activité septentrionale ; les premiers jours, la chaleur a été excessive. J’ai donc fait moins d’ouvrage que je ne désirais. Nous avons depuis deux jours la plus belle tramontane et un ciel parfaitement pur. Septembre et octobre seront, je pense, deux mois divins. Hier, avant le lever du soleil, j’allai à Acqua Acetosa. Il y a de quoi perdre l’esprit de voir l’éclat, la variété, la vaporeuse transparence et les couleurs divines du paysage, surtout des lointains.

Moritz étudie à présent les antiquités. Pour les mettre à l’usage de la jeunesse et de tous les hommes qui pensent, il les humanisera, il les purifiera de la moisissure des bouquins et de la poussière des écoles. Il a une heureuse et juste manière de considérer les choses. J’espère qu’il prendra aussi le temps d’être solide. Nous nous promenons ensemble le soir, et il me conte quelle partie il a méditée pendant le jour, ce qu’il a lu dans les auteurs ; ainsi se comble aussi cette lacune, que j’avais dû laisser à cause de mes autres occupations, et que je n’aurais pu remplir que tardivement et avec peine. Cependant j’observe les édifices, les rues, le paysage, les monuments, et, revenu le soir à la maison, je m’amuse à jeter sur le papier, tout en causant, une vue qui m’a particulièrement frappé. Tu trouveras ici incluse une esquisse de ce genre : elle est d’hier au soir. C’est à peu près la vue que présente le Capitole, quand on y monte par derrière.

J’allai voir dimanche, avec la bonne Angélique, les tableaux du prince Aldobrandini, et surtout un excellent ouvrage de Léonard de Vinci. Elle n’est pas heureuse comme elle mériterait de l’être, avec son grand talent et sa fortune qui s’accroît tous les jours. Elle est fatiguée de peindre pour la vente, mais son vieux mari trouve fort agréable de voir arriver de si lourdes sommes pour un travail souvent léger. Elle voudrait, elle pourrait maintenant travailler pour sa propre satisfaction, avec plus de loisir, d’étude et de soin. Ils n’ont point d’enfants, ils ne peuvent manger leurs revenus, et, avec un travail modéré, elle les augmente encore chaque jour. Mais cela n’est pas