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Page:Goethe - Œuvres, trad. Porchat, tome V.djvu/146

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et fort ; je mettrai les lettres dedans, et le roi vous donnera une bonne récompense ; il vous recevra avec honneur ; yous serez trois fois le bienvenu. »

Bellin, le bélier, crut tout cela. L’autre courut dans la maison, prit le sac et y fourra bien vite la tête décampe égorgé. Il songea en même temps au moyen d’empêcher le pauvre Bellin d’ouvrir la gibecière, et il dit, comme il sortait :

» Suspendez le sac à votre cou, et n’allez pas, mon neveu, prendre fantaisie de jeter les yeux sur les lettres : ce serait un fâcheux désir ; car je les ai soigneusement fermées, et vous ne devez pas y toucher. N’ouvrez.pas même le sac. J’ai entrelacé les nœuds artistement, ainsi que j’en ai la coutume, dans les affaires importantes entre le prince et moi. S’il trouve les cordons entrelacés comme d’habitude, vous mériterez sa faveur et ses cadeaux, en qualité de messager fidèle. Même, aussitôt que vous verrez le roi, si vous voulez vous mettre encore auprès de lui en meilleure posture, faites-lui entendre que vous avez donné vos bons avis pour ces lettres ; que vous avez prêté secours à l’écrivain : vous y gagnerez honneur et profit. »

Bellin fut ravi, et, dans sa joie, il s’élança de la place où il était, bondissant à droite et à gauche.

« Reineke, dit-il, mon neveu, mon seigneur, je vois à présent que vous m’aimez, que vous voulez me mettre en honneur. Cela me vaudra des louanges devant tous les seigneurs de la cour, d’avoir arrangé de si bonnes idées, de belles et charmantes paroles. Car, à la vérité, je ne sais pas écrire comme vous ; mais ils vont le croire, et c’est à vous seul que j’en serai redevable. C’est pour mon plus grand bien que je vous ai accompagné jusqu’ici. Maintenant, dites-moi, qu’en pensez-vous ? Lampe ne s’en vient-il pas à cette heure avec moi ?

— Non,"m’entendez-vous ! dit le rusé. C’est encore impossible. Prenez l’avance doucement. Il vous suivra, aussitôt que je lui aurai confié et commandé certaines affaires d !importance.

— Dieu soit avec vous, dit Bellin, je vais donc partir. » Et il fit diligence : vers midi il arrivait à la cour.

Dès que le roi l’aperçut, et qu’en même temps, il remarqua le petit sac : « Parlez, Bellin, dit-il, d’où venez-vous ? Où donc Reineke