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Page:Goethe - Œuvres, trad. Porchat, tome V.djvu/217

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LES SOUFFRANCES

DU JEUNE WERTHER.



LIVRE PREMIER.


4 mai.

Comme je suis joyeux d’être parti ! Cher ami, qu’est-ce que le cœur de l’homme ? Te quitter, toi qui m’es si cher, toi dont j’étais inséparable, et sentir de la joie ! Je sais que tu me le pardonnes. Mes autres relations n’étaient-elles pas choisies par le sort tout exprès pour tourmenter un cœur comme le mien ? Pauvre Éléonore !… Et pourtant ce n’était pas ma faute… En pouvais-je davantage, si, tandis que la grâce piquante de sa sœur me procurait un agréable amusement, une passion se développait dans son pauvre cœur ? Et pourtant… suis-je tout à fait sans reproche ? N’ai-je pas nourri ses sentiments ? Ne me suis-je pas même amusé de ce naïf langage de la nature, qui si souvent nous faisait rire, si peu risible qu’il fût ? N’ai-je pas… ?