Page:Goethe - Œuvres, trad. Porchat, tome V.djvu/287

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18 juillet.

Où j’ai dessein d’aller ? Je vais te le dire en confidence. Je resterai ici quinze jours encore, après quoi, je me suis fait accroire que je voulais visiter les mines de… ; mais, dans le fond, il n’en est rien : je veux seulement me rapprocher de Charlotte, - voilà tout. Et je ris de mon cœur…. et je fais tout ce qu’il veut.

29 juillet.

Non, c’est bien, tout est bien !… Moi, son époux ! 0 Dieu, qui m’as-donné la vie, si tu m’avais réservé cette félicité, ma vie entière eût été une adoration continuelle. Je ne veux pas contester, mais pardonne-moi ces larmes’, pardonne-moi mes vœux inutiles…. Elle, ma femme ! Si j’avais serré dans mes bras la plus aimable créature qui soit sous le soleil !… Wilhelm, tout mon corps frissonne, lorsqu’Albert entoure de son bras cette taille élégante.

Et l’oserai-je dire ? Pourquoi pas, Wilhelm ? Elle eût été plus heureuse avec moi qu’avec lui. Oh ! il n’est pas l’homme capable de remplir tous les vœux de cet ange. Un certain défaut de sensibilité, un défaut…. prends-le comme tu voudras…. Je ne vois pas la sympathie faire battre son cœur, à quelque passage d’un livre chéri, quand le cœur de Charlotte et le mien se rencontrent, et, dans cent autres occasions, lorsqu’il nous arrive d’exprimer nos sentiments sur les actions d’autrui…. Cher Wilhelm…. il est vrai qu’il l’aime de toute son âme ; et que ne mérite pas un pareil amour ?…

Un homme insupportable m’a interrompu. Mes larmes sont séchées. Je suis distrait.

Adieu, cher ami.