Page:Goethe - Œuvres, trad. Porchat, tome V.djvu/294

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lever les épaules ; dont la santé est tout à fait délabrée, et qui ne goûte, par conséquent, aucune joie sur la terre de Dieu ! Une pareille créature était seule capable de faire abattre mes noyers. Vois-tu, je n’en reviens pas. Figure-toi que les feuilles tombées lui rendent la cour humide et malpropre ; les arbres interceptent le jour à madame, et, quand les noix sont mûres, les enfants y jettent des pierres, et cela lui donne sur les nerfs, la trouble dans ses profondes méditations, lorsqu’elle pèse et met en parallèle Kennikot, Semler et Michaëlis. Quand j’ai vu les gens du village, surtout les vieux, si mécontents, je leur ai dit : « Pourquoi l’avez-vous souffert ?— A la campagne, m’ontils répondu, quand le maire veut quelque chose, que peut-on /aire ? * Mais voici une bonne aventure. : le- pasteur espérait aussi tirer quelque avantage des caprices de sa femme, qui d’ordinaire ne rendent pas sa soupe plus grasse, et il croyait partager le produit avec le maire ; la chambre des domaines en fut avertie et dit : « A moi, s’il vous plaît ! » car elle avait d’anciennes prétentions sur la partie du presbytère où les arbres étaient plantés, et elle les a vendus aux enchères. Ils sont à bas ! Oh ! si j’étais prince, la femme du pasteur, le maire, la chambre des domaines, apprendraient…. Prince !… Eh ! si j’étais prince, que m’importeraient les arbres de mon pays ?

10 octobre.

Que je voie seulement ses yeux noirs et je suis heureux ! Et ce qui me chagrine, c’est qu’Albert ne semble pas être aussi heureux qu’il…. l’espérait, que je — croyais l’être, si — Je n’aime pas à faire des traits de plume, mais ici je ne puis m’exprimer autrement — et il me semble que c’est assez clair.

12 octobre.

Ossian a pris la place d’Homère dans mon cœur. Quel monde que celui où me promène ce poète sublime ! Errer sur la bruyère,