Page:Goethe - Œuvres, trad. Porchat, tome VI.djvu/151

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Chapitre III

Enfin le moment arriva où l’on devait se disposer au départ, attendre les voitures et les carrosses, destinés à transporter toute la troupe au château du comte. Il s’éleva, par avance, de grands débats sur la question de savoir quelles personnes iraient ensemble, comment on serait placé. L’ordre et la distribution furent enfin réglés et arrêtés : ce ne fut pas sans peine, mais, hélas ! ce fut sans effet. À l’heure fixée, il arriva moins de voitures qu’on n’en attendait, et il fallut s’en accommoder. Le baron, qui les suivait de près à cheval, allégua que tout était en mouvement au château, parce que le prince était arrivé quelques jours plus tôt qu’on n’avait cru, et qu’il était aussi survenu des visites inattendues : on manquait de place, aussi ne seraient-ils pas aussi bien logés qu’on l’avait promis, ce qui lui faisait une peine extraordinaire.

On s’entassa dans les voitures aussi bien que l’on put, et, comme le temps était assez beau et le château à quelques lieues seulement, les plus dispos aimèrent mieux faire la route à pied que d’attendre le retour des voitures. La caravane partit avec des cris de joie, et, pour la première fois, sans souci de savoir comment ils payeraient l’aubergiste. Le château du comte se présentait à leur imagination comme un palais de fées ; ils étaient les gens les plus heureux et les plus joyeux du monde ; et, chemin faisant, chacun à sa manière faisait dater de ce jour une suite de plaisirs, d’honneurs et de prospérités.

Une pluie abondante, qui survint tout à coup, ne put les arracher à ces impressions agréables ; mais, comme elle était toujours plus tenace et plus forte, plusieurs en furent assez incommodés. La nuit vint, et nul spectacle ne leur pouvait être