Aller au contenu

Page:Goethe - Œuvres, trad. Porchat, tome VI.djvu/389

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

DE WILHELM MEISTER. 385

GOETHE. ANX. D’APPR. Sa

même. Dans tous les apprêts des solennités et des fêtes, la pompe et la dignité éveillaient une satisfaction secrète, et je pouvais tout aussi peu comprendre qu’un seul homme eût inventé et ordonné toutes ces choses, et que plusieurs se fussent réunis pour accomplir ensemble un si grand dessein. Et cependant l’hôte et ses gens montraient une parfaite aisance ; on ne remarquait pas une trace de contrainte et de vaine cérémonie. Le mariage même se fit à l’improviste, d’une manière touchante nous fûmes surpris par une excellente musique vocale, et le pasteur sut donner à cette cérémonie une sérieuse solennité.

J’étais auprès de Philon. Au lieu de me féliciter, il me dit avec un profond soupir

Quand j’ai vu votre sceur donner sa main, il m’a semblé qu’on m’arrosait d’eau bouillante.

Pourquoi ? lui dis-je.

C’est toujours ainsi, quand je vois unir deux époux. » Je me moquai de lui, mais, depuis, ses paroles me sont revenues plus d’une fois à la mémoire.

L’allégresse de la société, où se trouvaient beaucoup de jeunes gens, paraissait d’autant plus brillante, que tous les objets qui nous environnaient étaient nobles et sérieux.’ Tous les meubles, la vaisselle, le linge et le service de table, s’accordaient avec l’ensemble, et, si les architectes me semblaient ailleurs sortis de la même école que les confiseurs, ici le confiseur et l’officier qui avait la charge de mettre le couvert semblaient s’être formés à l’école de l’architecte.

Comme la réunion devait durer plusieurs jours, l’hôte, ingénieux et sage, avait préparé a la société des plaisirs de tout genre. Je n’eus pas à faire encore la triste observation, que j’avais faite si souvent, du malaise qu’éprouve une société nombreuse et diverse, qui, étant laissée à elle-même, est forcée de recourir aux passe-temps les plus vulgaires et les plus vides, et d’ennuyer les gens d’esprit afin que les sots s’amusent. Notre oncle avait disposé les choses tout autrement. Il avait établi deux ou trois maréchaux, si je puis les nommer ainsi. L’un était chargé de pourvoir aux plaisirs de la jeunesse la danse, les promenades en voiture, les petits jeux étaient de