Page:Goethe - Œuvres, trad. Porchat, tome VII.djvu/136

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si doux, que je m’oublie moi-même et lui dis aussitôt en la relevant :

« Calme-toi, mon enfant ; je ferai mon possible. »

« Puis, je m’éloignai par une allée latérale.

« Faites l’impossible ! mecria-t-elle.

« Je ne sais plus quelle réponse je voulus lui faire, mais je dis :

« Je veux…. »

« Et je ne pus achever.

« Faites l’impossible ! » dit-elle vivement ! avec l’expression d’une sainte espérance.

« Je lui dis adieu, et m’éloignai promptement.

« Je ne voulus pas m’adresser d’abord à mon oncle, car je savais trop bien qu’on n’osait pas lui faire considérer un détail, quand il avait pris une résolution générale. Je cherchai l’homme d’affaires : il était sorti. Le soir, il vint du monde, des amis, qui voulaient me faire leurs adieux. Le jeu et le souper se prolongèrent fort avant dans la nuit. Ils restèrent le lendemain, et la distraction effaça l’image de la malheureuse suppliante. L’homme d’affaires revint : il était plus occupé, plus pressé que jamais ; chacun demandait à lui parler ; il n’avait pas le temps de m’écouter. Cependant je fis une tentative pour m’emparer de lui ; mais, à peine avais-je prononcé le nom de ce pieux fermier, qu’il m’interrompit vivement :

« Au nom du ciel, ne dites pas un mot de cette affaire à votre « oncle, si vous ne voulez pas avoir des désagréments. »

« Le jour de mon départ était fixé, j’avais des lettres à écrire, des amis à recevoir, des visites à faire dans le voisinage. Mes domestiques, suftisants pour le service ordinaire, étaient incapables de me rendre plus légers les embarras du départ ; tout reposait sur moi, et pourtant, l’homme d’affaires m’ayant donné une heure pendant la nuit, pour prendre nos arrangements pécuniaires, j’essayai de le prier encore pour le père de Valérine.

« Mon cher baron, me dit cet homme à l’humeur vive, com« ment pouvez-vous songer à cela ? Aujourd’hui même, j’ai « déjà soufenu un rude combat contre monsieur votre oncle ; * car ce qui vous est nécessaire pour votre voyage s’élève « beaucoup plus haut que nous n’avions pensé. Cela est tout à