Page:Goethe - Œuvres, trad. Porchat, tome VII.djvu/209

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qu’elle répondit à ces vers, avec une consolante sérénifé, en prenant le temps de composer et de polir la strophe suivante :

« Si profondes que soient la douleur et la peine où ton âme est plongée, la vie t’appelle au bonheur de la jeunesse. Prends courage, et marche vivement, d’un pas assuré ; viens dans la céleste et radieuse lumière de l’amitié : que tu puisses te sentir au milieu de cœurs tendres et fidèles, et que pour toi jaillisse une pure source de vie ! »

Le bon docteur se chargea du message : il réussit. Déjà Flavio répondait avec modération. Hilarie continua de le calmer, et peu à peu le jour sembla redevenir serein, la position plus facile. Peut-être nous sera-t-il permis de communiquer à nos lecteurs toute la suite de cette cure charmante. Quelques jours s’écoulèrent très-agréablement dans ces occupations ; on se préparait à une nouvelle et tranquille entrevue, que le médecin ne voulait pas différer plus qu’il ne serait nécessaire.

Sur ces entrefaites, la baronne avait arrangé et mis en ordre d’anciens papiers, et cette distraction, tout à fait en harmonie avec la situation présente, produisit un étrange effet sur son esprit ému. Elle passa en revue bien des années de sa vie : de menaçantes et pénibles souffrances étaient passées, dont-la méditation fortifiait maintenant son courage ; elle fut surtout émue par le souvenir des rapports pleins de charmes qu’elle avait eus avec Macarie dans de graves circonstances. Les admirables qualités de cette femme unique lui revinrent à la pensée, et sur-le-champ elle prit la résolution de s’adresser à elle cette fois encore : à qui pouvait-elle mieux faire part des sentiments qui l’agitaient, à qui mieux exposer ses craintes et ses espérances ?

En faisant sa revue, elle avait retrouvé entre autres un portrait en miniature de son frère, et ne put s’empêcher de soupirer et de sourire, en voyant la ressemblance de ce portrait avec le fils. Hilarie la surprit dans ce moment, s’empara du portrait, et fut aussi étrangement frappée de cette ressemblance.

Au bout de quelque temps, avec la permission du docteur et sous sa conduite, Flavio, qui s’était fait annoncer, parut au déjeuner. Les dames avaient redouté cette première entrevue ; mais il arrive souvent qu’un incident joyeux, et même risible,