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Page:Goethe - Œuvres, trad. Porchat, tome VII.djvu/320

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gneusement, cet homme survient bien à propos, et, depuis que je vous ai rencontré, je désirais en secret sa présence. Il vous aurait tout expliqué mieux que ces jeunes filles, avec toute leur bonne volonté. Il est passé maître dans son métier ; il peut expliquer tout ce qui se rapporte au filage et au tissage ; il sait l’exécuter, entretenir les outils et les réparer, selon qu’il est nécessaire et que chacun peut le désirer. »

Je m’entretins avec cet homme et le trouvai très-intelligent, ayant une certaine instruction, et connaissant fort bien son métier ; je pus m’en assurer, en revenant avec lui sur quelques-unes des choses que j’avais apprises chez les montagnards, et en lui demandant de lever quelques difficultés. Je lui dis entre autres ce que j’avais appris la veille des premières opérations du tissage.

« C’est à merveille., répondit-il d’un air joyeux, et je viens à propos pour donner à un aimable monsieur les détails néces^ saires sur le plus ancien et le plus bel art, qui distingue véritablement l’homme de la brute. Nous arriverons justement aujourd’hui chez d’habiles et bonnes gens, et je veux ne pas mériter le titre de maître rhabilleur, si je ne vous fais comprendre ce travail, aussi bien que je l’entends moi-même. »

Je le remerciai cordialement ; nous continuâmes à discourir sur divers sujets, et, après avoir fait une halte pour déjeuner, nous arrivâmes à un groupe de maisons, sans alignement, comme les autres, mais mieux bâties. Notre nouveau compagnon nous conduisit à la plus apparente. Le marchand, Saint-Christophe et moi, nous entrâmes les premiers, ainsi que nous en étions convenus ; puis, après que.nous eûmes salué gaiement les gens de la maison, le rhabilleur nous suivit, et nous admirâmes la joyeuse surprise que son arrivée causa dans la famille : le père, la mère, les filles, les jeunes enfants, se rassemblèrent autour de lui ; une fille bien faite, assise devant le métier, laissa immobile dans sa main- la navette, qui allait courir h travers la chaîne ; elle resta elle-même à sa place, se leva, et ne vint que plus tard, d’une marche lente et embarrassée, toucher la main du jeune homme.

Le marchand et le rhabilleur se mirent bientôt h rire et à jaser, comme il appartient à d’anciens amis, et, quand on se fut