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Page:Goethe - Œuvres, trad. Porchat, tome VII.djvu/488

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rection insinuante et par votre exemple, que chez tout homme germe en secret la force de la vertu ; l’estime générale sera votre récompense, et, mieux que le premier homme d’État et le plus grand héros, vous mériterez qu’on vous proclame LE PÈRE DE LA PATRIE. »

« Votre avoué mérite nos éloges, dit la baronne ; il est charmant, sage, amusant et instructif. Tels devraient être tous ceux qui veulent nous détourner ou nous faire revenir d’une erreur. En vérité, votre conte mérite, plus que beaucoup d’autres, le titre honorable de conte moral. Donnez-nous-en beaucoup de pareils, et notre société y prendra certainement plaisir.

LE VIEILLARD.

Si cette histoire obtient votre suffrage, j’en suis charmé ; mais, si vous demandez d’autres contes moraux, j’ai le regret de vous dire que celui-là est le premier et le dernier.

LOUISE.

Il n’est pas fort honorable pour vous de n’avoir justement dans votre collection qu’une seule histoire de la meilleure

espèce.

LE VIEILLARD.

Vous me comprenez mal : ce n’est pas la seule histoire morale que je puisse raconter, mais elles se ressemblent toutes, au point que l’on semble raconter toujours la même.

LOUISE.

Vous devriez enfin vous désaccoutumer de ces paradoxes, qui ne font qu’embrouiller la conversation. Expliquez-vous plus clairement.

LE VIEILLARD.

Très-volontiers. Pour qu’un récit mérite d’être appelé moral, il doit montrer que l’homme possède en lui la force d’agir même contre son inclination, par le sentiment de quelque chose de meilleur.

LOUISE.

Il faut donc, pour agir moralement, agir contre son inclination ?

LE VIEILLARD.

Oui.