Page:Goethe - Œuvres, trad. Porchat, tome VII.djvu/512

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« Vieillard, vieillard, écoute ! nous avons oublié le plus important. »

Il ne les entendit point. Il s’était laissé emporter plus bas par le courant, sur la même rive, où il voulait cacher cet or dangereux dans une place montueuse, que l’eau ne pût jamais atteindre. Il trouva, entre deux grands rochers, une vaste crevasse : il y versa l’or et repassa la rivière.

Dans cette crevasse se trouvait le beau serpent vert, qui fut tiré de son sommeil par le tintement de l’or qui tombait. Il vit à peine les pièces brillantes qu’il les avala sur-le-champ de grand appétit, cherchant soigneusement toutes celles qui s’étaient dispersées dans les buissons et dans les fentes du rocher.

A peine les eut-il avalées qu’il sentit, avec l’impression la plus agréable, l’or se fondre dans ses entrailles et se répandre dans tout son corps, et, à sa grande joie, il s’aperçut qu’il était devenu lumineux et transparent. On lui avait longtemps assuré que ce phénomène était possible ; toutefois, comme il doutait que cette lumière durât longtemps, la curiosité et le désir de prendre ses précautions pour l’avenir le poussèrent hors du rocher pour découvrir qui pouvait avoir versé ce bel or dans la crevasse. Il ne trouva personne, mais il prit beaucoup de plaisir ’ à s’admirer lui-même, comme il rampait à travers le gazon et les broussailles, et à voir l’agréable lumière qu’il répandait parmi la fraîche verdure. Toutes les feuilles semblaient être d’émeraude, toutes les fleurs magnifiquement illuminées. Il traversa inutilement la sauvage solitude ; mais son espoir augmenta, lorsqu’il arriva dans la plaine et qu’il vit de loin une clarté qui était semblable à la sienne. « Je trouve enfin mon -pareil ! » s’écria-t-il, et il courut de ce côté. Il ne s’arrêta pas à la difficulté de ramper à travers le marais et les roseaux ; en effet, bien qu’il vécût de préférence dans les sèches prairies des montagnes et les profondes crevasses des rochers ; qu’il aimât à se nourrir de plantes aromatiques, et qu’il apaisât d’ordinaire sa soif avec la douce rosée et les eaux des sources fraîches : pour l’amour de cet or chéri, et dans l’espoir de la magnifique lumière, il aurait entrepris tout ce qu’on lui aurait demandé.

Enfin il arriva très-fatigué dans un marécage où nos deux feux follets jouaient de place en place. Il marcha droit à eux,