Page:Goethe - Œuvres, trad. Porchat, tome VIII.djvu/83

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termina la dimension des grands tableaux à l’huile qui seraient exécutés pour les remplir. Ces peintures ne devaient pas être encadrées, mais fixées aux murs comme tapisseries. Alors on se mit à l’ouvrage avec ardeur.

Seekatz se chargea des scènes champêtres, où les vieillards et les enfants, peints d’après nature, lui réussissaient admirablement ; il était moins heureux dans les jeunes hommes, la plupart trop maigres, et ses femmes déplaisaient par la raison contraire. C’est qu’il était le mari d’une bonne grosse petite personne, mais désagréable, qui ne lui permettait guère d’autre modèle qu’elle-même, en sorte qu’il ne pouvait rien produire de gracieux. De plus il avait dû dépasser les proportions de ses figures. Ses arbres avaient de la vérité, mais le feuillage en était mesquin. Il était élève de Brinckmann, dont le pinceau n’est pas à dédaigner dans les tableaux de chevalet.

Schutz, le peintre de paysage, se trouvait peut-être mieux à sa place. Il possédait parfaitement les contrées du Rhin, comme les tons lumineux qui les animent dans la belle saison. Ce n’était pas une chose toute nouvelle pour lui de travailler dans de plus grandes proportions, et, là même, il ne péchait ni par l’exécution ni par l’ensemble. Il donna de très-riants tableaux.

Trautmann traita à la Rembrandt quelques scènes de résurrection du Nouveau Testament ; outre cela, il mit en flammes des villages et des moulins. Comme je pus le remarquer par le plan des chambres, on lui avait réservé un cabinet particulier. Hirt peignit quelques belles forêts de chênes et de hêtres ; ses troupeaux étaient dignes d’éloges. Junker, accoutumé à l’imitation des peintres flamands les plus minutieux, pouvait moins que tout autre se faire à ce style de tapisseries : mais il se décida, pour de bons honoraires, à décorer de fleurs et de fruits quelques compartiments.

Comme je connaissais tous ces artistes dès ma première enfance, et que je les avais visités souvent dans leurs ateliers ; que d’ailleurs le comte voulait bien me souffrir autour de lui, j’assistais aux propositions, aux délibérations et aux commandes, tout comme aux livraisons, et je me permettais fort bien d’exprimer mon opinion, surtout quand des esquisses et des ébauches étaient présentées. Je m’étais déjà fait chez les amateurs de