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Page:Goethe - Œuvres, trad. Porchat, tome X.djvu/408

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lorsqu’il eut élevé l’imposant édifice de sa doctrine, tous ceux qui, se donnant carrière, avaient jusqu’alors poétisé et philosophé librement, durent y voir une forteresse menaçante, d’où l’on mettrait des bornes à leurs joyeuses courses dans le champ de l’expérience.

Mais ce ne fut pas seulement le philosophe, ce fut le poète, qui eut beaucoup, qui eut tout à craindre de la nouvelle direction de l’esprit, aussitôt qu’une grande masse se laissa entraîner par elle. En effet, quoiqu’il parût d’abord que l’on n’avait en vue que la science, puis la morale et ses plus proches dépendances, il était facile de voir que, si l’on songeait à donner une base plus solide à ces graves intérêts de la haute science et de la conduite morale ; si l’on demandait dans ce domaine un jugement plus sévère, mieux enchaîné, développé des profondeur ? de l’humanité, on ne tarderait pas non plus de signaler au goût ces principes et l’on chercherait à écarter complétement le goût particulier, la culture accidentelle, les particularités nationales, et qu’on invoquerait une loi plus générale comme règle décisive.

C’est aussi en effet ce qui arriva, et il s’ouvrit dans la poésie une époque nouvelle, qui devait être«en contradiction avec notre ami comme lui avec elle. Dès lors il eut à subir plusieurs jugements peu équitables, dont il ne fut pas très-ému, et je signale ici cette circonstance, parce que le débat qui s’en est suivi dans la littérature allemande n’est nullement apaisé et terminé, et qu’un homme bienveillant, qui se propose d’apprécier le mérite de Wieland et de maintenir fermement sa mémoire, devra connaître exactement la situation des choses, la naissance comme le développement des opinions, le caractère, les talents des coopérateurs, les forces, les mérites des deux partis, et, pour agir d’une manière impartiale, appartenir en quelque mesure à l’un et à l’autre.

Mais je suis détourné des grandes ou petites querelles auxquelles ces nouveautés ont donné naissance, par une sérieuse réflexion à laquelle nous devons désormais nous abandonner.

La paix, heureusement fixée durant de longues années entre nos collines et nos montagnes, dans nos vallons bien arrosés, était depuis longtemps troublée ou du moins menacée par des