Page:Goethe - Œuvres, trad. Porchat, tome X.djvu/427

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PIRON.

Piron était un causeur des plus agréables et des plus spirituels, et le ton libre et joyeux de ses écrits est aussi plein d’attrait et de yie.

Les critiques français regrettent que, dans la collection de ses ouvrages, on n’ait pas été assez sévère. On aurait dû, pensentils, abandonner bien des choses à l’oubli. Le jugement dédaigneux des critiques paraît tout à fait ridicule en présence de !a masse de livres insignifiants que nous voyons étalés, qui pourtant appartiennent tous à la postérité et que nul bibliothécaire n’a le droit de proscrire. Pourquoi veut-on nous dérober les essais,les compositions ingénieuses et légères d’un bon esprit ?

Ces travaux légers sont justement ceux qui nous affectionnent d’abord à Piron. C’était une bonne et forte tête. -Né et élevé dans une ville de province, et, plus tard, menant à Paris une vie pauvre, il se développa par lui-même plus qu’il ne put profiter pour sa culture des avantages que le siècle lui présentait. C’est pourquoi il se trouve toujours dans ses premiers ouvrages quelque chose à rejeter.

Nous ne dissimulerons pas qu’il ne nous intéresse peut-être jamais plus que lorsqu’il prodigue son talent, dans l’occasion, pour un but étranger. Comme Gozzi, .quoique avec moins de force et d’étendue, il s’attache aux théâtres gênés ou limités ; il travaille pour eux, les met en réputation, et se plaît à produire des choses inattendues.

On sait que les théâtres de Paris étaient rigoureusement distingués les uns des autres ; chaque théâtre avait un privilége déterminé, borné à tel ou tel genre de spectacle. Toutes les autres formes étant déjà concédées, un artiste obtint encore la permission de représenter des monodrames, dans le sens le plus rigoureux. D’autres personnages pouvaient bien encore paraître sur la scène, mais cet artiste pouvait seul agir et parler. Piron