Page:Goethe - Œuvres, trad. Porchat, tome X.djvu/437

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présent et empêcher le mal plus grave. C’est toute l’activité . qu’il peut déployer encore dans ses chaînes. Le père s’efforce de se délivrer des serpents, et le corps fuit en même temps devant la morsure soudaine. L’aîné des fils est saisi d’horreur en voyant le mouvement de son père, et il cherche à se délivrer du serpent qui l’enlace légèrement.

Nous avons déjà signalé le point suprême du moment repréS3nté comme un grand mérite de cet ouvrage : c’est de quoi nous avons à dire encore quelques mots.

Nous avons supposé que des serpents naturels ont enlacé pendant le sommeil un père avec ses fils, afin d’avoir devant nous une gradation dans l’étude des moments. Les premiers instants de l’enlacement pendant le sommeil sont menaçants, mais insignifiants pour l’artiste. On pourrait représenter un jeune Hercule endormi, enlacé par des serpents ; mais sa taille et son corps nous diraient ce que nous pouvons attendre de son réveil.

Allons plus loin et figurons-nous le père, qui se sent, comme que ce soit, enveloppé avec ses fils par les serpents : il n’y a qu’un seul moment d’intérêt suprême, c’est celui où l’un des corps est rendu impuissant par les étreintes, où l’autre se défend mais est blessé, et où le troisième conserve encore une espérance de fuite. Le premier cas est celui du plus jeune fils, le second, celui du père, le troisième, celui de l’aîné. Qu’on cherche à trouver un autre cas, qu’on cherche à partager les rôles autrement qu’ils sont ici distribués !

.Représentons-nous l’action dès le commencement, reconnaissons qu’elle est arrivée au point culminant, et nous sentirons aussitôt, en réfléchissant aux moments qui ont suivi, que tout le groupe doit changer, et qu’on ne saurait plus trouver un instant qui soit égal à celui-là en valeur esthétique. Le plus jeune fils est étouffé par le serpent qui l’embrasse, ou, s’il le provoque, dans sa situation tout à fait désespérée, il souffre encore une morsure. Les deux éventualités sont insupportables, parce qu’elles sont un état suprême, qui ne doit pas être offert aux regards. Quant au père, ou bien il est mordu en d’autres endroits, ce qui doit changer toute sa pose, et les premières blessures sont perdues pour le spectateur, à moins qu’elles ne lui soient montrées, ce qui provoquerait son dégoût ; ou bien le serpent