Page:Goethe - Œuvres, trad. Porchat, tome X.djvu/458

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constances dans lesquelles il a travaillé ce qu’on met à sa charge, et en cherchant à démontrer que ses décisions et ses actes lui ont été imposés plutôt qu’ils ne sont émanés de lui.

Les œuvres d’art comme celle-là, qui doivent frapper les yeux, faire sensation et même exciter l’étonnement, sont d’ordinaire exécutées dans des proportions colossales. Dans son tableau de la Cène .Léonard dépasse déjà de moitié la grandeur naturelle ; les figures étaient calculées pour neuf pieds, et quoique douze soient assises, ou que, placées derrière la table, elles doivent être considérées comme des demi-figures ; qu’une seule soit debout, mais courbée, le tableau, même à une distance considérable, doit avoir été d’un effet prodigieux. C’était ce qu’on voulait reproduire, sinon dans les détails avec une délicatesse caractéristique, du moins dans l’ensemble avec une vive énergie.

Pour le public, c’était un prodige qu’on annonçait. Un tableau de vingt-huit pieds de long sur dix-huit pieds de haut, devait être composé de mille et mille petits morceaux de verre, après qu’un artiste ingénieux aurait copié soigneusement tout l’ouvrage, l’aurait médité, et, appelant à son aide tous les moyens matériels et intellectuels, aurait reproduit du mieux possible l’ouvrage perdu. Et pourquoi douter qu’une pareille entreprise pût s’exécuter au moment où l’État éprouvait une transformation mémorable ? Pourquoi l’artiste n’aurait-il pas été entraîné à produire dans une pareille époque ce qui aurait pu sembler absolument impraticable en temps ordinaire ?.

Une fois qu’il fut résolu que la copie serait de même grandeur que l’original, Bossi, qui s’était chargé du travail, nous paraît excusable de s’être arrêté à la copie de Vespino. L’ancienne copie de Castellazzo, à laquelle on reconnaît justement de grands avantages, est notablement plus petite que l’original. Si l’artiste avait voulu s’en servir exclusivement, il aurait dû agrandir les corps et les têtes, trr.vail inimaginable, le dernier surtout, comme le savent fort bien tous les connaisseurs.

On a reconnu depuis longtemps qu’il n’appartient qu’aux plus grands maîtres de peindre dans des proportions colossales