Page:Goethe - Œuvres, trad. Porchat, tome X.djvu/483

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mais le changement d’opinion, le retour à l’ancien ordre de choses oppresseur des âmes, combattu énergiquement par nos pères, menacer de lui ravir pour jamais un de ses amis lés plus chers ! A ce coup, son mécontentement ne connaît point de mesure ; sa douleur est sans bornes, à ce triste démembrement de son aimable entourage. Il ne pourrait surmonter sa peine et son chagrin, si la Muse ne lui offrait pas cette fois encore l’inestimable avantage d’exhaler en vers harmonieux le sentiment qui l’oppresse dans le sein d’un ami qui partage sa douleur.

Sans plus nous occuper dès sentiments généraux et particuliers exprimés par le poète, si nous revenons à son talent d’exposition, diverses réflexions se présentent à notre esprit.

C’est déjà par une sorte de poésie, vouée surtout à la nature et, l’on peut dire, à la réalité, qu’un homme, d’ailleurs prosïique, est disposé à attacher une valeur particulière aux choses qu’il possède, à ce qui l’entoure immédiatement. Cette aimable expression d’un égoïsme qui nous fait trouver une saveur plus agréable aux productions de notre sol, qui nous persuade que nous préparons, même pour nos amis, un meilleur régal avec les fruits qui ont mûri dans notre jardin, cette persuasion, est déji une sorte de poésie, que le génie artiste ne fait que développer en lui ; il donne à sa chose d’abord une valeur particulière par sa préférence, pais une valeur générale, une incontestable dignité, par son talent, et, de la sorte, il Sait consacrer et transmettre sa propriété à ses contemporains, au monde et à la postérité.

Cet effet, qui tient de la magie, une nature énergique, qui sent profondément, le produit par une intuition fidèle, par une affectueuse persévérance, en isolant les situations, en traitant chacune en soi comme un tout, et, par là, elle satisfait aux conditions fondamentales, indispensables, de valeur intérieure ; mais cela ne suffit pas : il faut encore des moyens extérieurs pour former de cette matière un beau corps. Ces moyens sont la langue et le rhythme. Et c’est là encore que noire poète montre au plus haut point sa supériorité.

Il semble que le Bas-Allemand a ses motifs tout particuliers pour étudier la langue avec amour. Séparé de tout ce qui n’est