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Page:Goethe - Œuvres d'Histoire naturelle, trad. Porchat (1837).djvu/162

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ANATOMIE

appareil maxillaire : avant tout il est forcé de ne mâcher que ce qu’il peut prendre. L’état de dépendance des ruminants provient de leur mastication incomplète, et de la nécessité où ils se trouvent de remâcher des substances à moitié digérées.

Sous ce point de vue, les rongeurs présentent une organisation très remarquable. Ils saisissent fortement mais peu à la fois, se rassasient vite, et rongent les objets à plusieurs reprises ; ils les détruisent sans but, sans utilité, et en les attaquant avec une persévérance passionnée et presque convulsive ; ce besoin se transforme quelquefois en une tendance à bâtir des maisons et à s’arranger un lit : preuve évidente que dans la vie organique ce qui est inutile et même nuisible occupe sa place dans le cercle fatal de l’existence, joue son rôle dans l’ensemble, et doit être considéré comme un lien nécessaire.

En général les rongeurs sont bien proportionnés ; les limites extrêmes sont assez rapprochées ; toute leur organisation les rend accessibles aux impressions extérieures ; elle est en même temps douée d’une élasticité qui lui permet de se développer dans tous les sens.

Je serais tenté de faire dériver cette élasticité, de leur système dentaire, qui est incomplet et très faible relativement, quoique fort en lui-même ; système qui fait que cette famille présente des formes arbitraires qui vont quelquefois jusqu’à la difformité.

Parmi les observateurs consciencieux qui se livrent à ce genre de recherches, quel est celui que cette oscillation entre la forme régulière et la difformité n’a pas rendu quelquefois à moitié fou ? Pour nous autres, êtres bornés, il faut souvent mieux être ancrés dans l’erreur que de flotter dans le vrai.

Tâchons de poser quelques jalons dans ce vaste champ. Les animaux types, tels que le lion, l’éléphant,