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Page:Goethe - Œuvres d'Histoire naturelle, trad. Porchat (1837).djvu/164

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ANATOMIE

de sa race, il fait preuve d’une habileté extraordinaire. Maniant avec une adresse infinie les petits objets qui excitent ses désirs, il semble jouer avec eux, tandis qu’en réalité il se prépare et se facilite une jouissance. Ce petit être est plein de grâce et de gentillesse lorsqu’il ouvre une noix, ou lorsqu’il détache les écailles d’un cône de pin bien mûr.

Mais ce n’est pas seulement la forme du corps qui se métamorphose au point de devenir méconnaissable ; la peau extérieure qui enveloppe l’animal varie du tout au tout. À la queue, on observe des anneaux cartilagineux ou écailleux ; sur le corps, des soies ou des aiguillons, et tous les passages à une fourrure molle et veloutée.

Pour découvrir les causes éloignées de ces phénomènes, il faut s’avouer d’abord que les influences seules des éléments n’ont pas amené tous ces changements, mais qu’il existe encore d’autres causes prédisposantes qu’on doit faire entrer en ligne de compte.

Les rongeurs ont un appétit insatiable et un organe de préhension très parfait. Les deux dents antérieures de la mâchoire supérieure et de l’inférieure avaient fixé depuis long-temps mon attention ; elles sont propres à saisir les corps les plus variés ; aussi ces animaux cherchent-ils à s’approprier leur nourriture par mille voies diverses. Ils mangent de tout ; quelques uns sont avides de nourriture animale, la plupart de substances végétales. L’acte de ronger peut être considéré comme une prégustation tout-à-fait indépendante de la nutrition proprement dite : c’est une préhension d’aliments dont la plus grande partie n’entre pas dans l’estomac, et on peut la considérer comme un exercice habituel, un besoin inquiet d’occupation, qui dégénère enfin en une destructivité pour ainsi dire spasmodique. Le besoin du moment est à peine