Page:Goethe - Hermann et Dorothée, 1886, trad. Boré.djvu/35

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longtemps, pour chercher et choisir le vieux linge, qu’il était tard quand le paquet fut assemblé. De même le vin et la bière ont été emballés lentement, mais soigneusement. Lorsque enfin, hors des murs, j’eus gagné la route, je rencontrai en foule nos concitoyens refluant, avec femmes et enfants, vers la ville, car les exilés s’étaient déjà éloignés. Je dirigeai, en l’excitant encore, la course rapide de mes chevaux vers le village, où, comme je venais de l’entendre, la troupe de ces infortunés devait faire halte et passer la nuit. Je suivais la nouvelle chaussée : une charrette, aux solides brancards, frappa ma vue. Elle était traînée par deux bœufs d’un autre pays, d’une taille et d’une force extraordinaires. Tout près de ces puissants animaux, marchait, à grands pas, une jeune fille, munie d’une longue gaule, qui les dirigeait, les excitant ou les retenait habilement. M’ayant aperçu, elle s’approcha tranquillement des chevaux et me dit :

« Nous n’avons pas toujours été dans une détresse semblable à celle où vous nous voyez sur cette route. Je ne suis pas encore habituée à demander à l’étranger une aumône que, souvent, il donne de mauvaise grâce, et uniquement pour se débarrasser du pauvre ; mais la nécessité me force de parler. Là, sur la paille, gît, étendue, la femme d’un riche propriétaire. Elle vient d’accoucher.